Thursday, October 31, 2013

8e Championnats du Monde de Sudoku - Partie 1



Du 12 au 19 octobre avaient lieu à Beijing, Chine, les 8e championnats du monde de sudoku ainsi que les 22e championnats du monde de jeux de logique. J'y participais au sein de l'équipe de France pour la 3e année consécutive, avec en ligne de mire, outre le fait de profiter au maximum des événements, trois objectifs principaux : approcher autant que faire se pût un podium en finale du Sudoku Grand Prix, améliorer ma marque de l'an dernier lors des championnats de sudoku (6e), et contribuer à établir, toujours en sudoku, une nouvelle meilleure performance d'équipe (précédemment, 5e en 2012). Tout ne se sera pas déroulé comme prévu... vous pourrez en juger. Place au compte-rendu du voyage et de la première journée de compétition.



Vendredi 11 et samedi 12 octobre - voyage et arrivée en Chine
Après une nuit passée en région parisienne en compagnie de mon coéquipier Sylvain Caudmont, tous deux profitant de l'appartement d'une hôtesse de nos amies (hébergement de qualité, à conseiller), je retrouvai à l'aéroport de Roissy les six autres membres de la délégation française... moins un. Empêtré dans un mélange de grèves et de défaillances du sens de l'orientation, notre ami et co-auteur Geoffroy Hermelin s'avéra dans l'impossibilité d'atteindre l'aéroport à temps pour le décollage, réduisant d'un quart l'effectif de l'équipe Sudoku-B. Les choses ne partaient pas du meilleur pied.
Un bref premier vol nous mena à Zürich et c'est en terre suisse que nous retrouvâmes nos premiers adversaires - autant qu'amis -, les suisses Christoph Bruetsch et Frédéric Stalder, et l'allemand Michael Ley.
Quelques formalités plus tard, nous étions en route pour Beijing ; vol tranquille, passé entre entraînement - modéré -, musique et tentatives de sieste afin de déjouer le décalage horaire (nous devions arriver en début de matinée et allions donc écoper de l'équivalent d'une nuit blanche).
Atterrissage sans histoire et, après avoir récupéré une partie de l'équipe de Pologne, montée dans le bus en direction de l'hôtel... "Château-Laffitte". Au temps pour le dépaysement, mais le cadre promettait du moins d'être agréable.

Le très typique hôtel Château-Laffitte

Sur place, une fois expédiées (laborieusement) les formalités d'arrivée, nous décidâmes de ne pas nous attarder davantage dans le hall et allâmes sans tarder faire la connaissance de notre chambre, ayant bien l'intention de profiter des deux premières journées pour nous reposer au maximum afin d'aborder la compétition dans un état de forme acceptable. La chambre n'avait pas mauvaise allure si l'on n'y regardait pas de trop près, mais d'emblée, double mauvaise surprise : l'unique élément de la pièce évoquant une fenêtre s'avérait opaque et impossible à ouvrir, et l'air ambiant avait tendance à piquer le nez et la gorge. Peu engageant.
Le soir venu, la cérémonie d'ouverture nous confirmait que les organisateurs n'avaient pas lésiné sur les moyens pour faire de ces championnats un événement marquant : intervention de diverses personnalités, montée du drapeau national et de celui de la World Puzzle Federation, et lancement officiel de la compétition à l'aide d'un énorme tambour traditionnel, le tout sous l'oeil de la télévision chinoise.

Dimanche 13 octobre - visite et photographies officielles
Une mauvaise nuit plus tard, montée dans le bus afin d'entamer la traditionnelle journée de visite, particulièrement alléchante compte tenu du lieu. Au programme, promenade sur la Grande Muraille, crochet par les tombeaux des empereurs Ming, pour finir par les installations des jeux olympiques de 2008. La route menant aux tombeaux s'étant malencontreusement avérée barrée pour la journée, nous nous contentâmes finalement de la fameuse muraille (et du non moins impressionnant cortège de vendeurs de babioles faisant son siège) et de la visite du Watercube (stade nautique) et du Birdnest (stade olympique). La journée fut également consacrée aux photographies d'équipes et à la photo générale.
Nous eûmes entre temps droit à un déjeuner plus que copieux dans un restaurant, où nous eûmes confirmation du fait que la consommation d'eau plate à table allait cette année encore s'avérer un problème.

L'équipe française au quasi-complet

Lundi 14 octobre - premier jour de compétition WSC
Réveil plus que pénible ce lundi, avec un fort mal de gorge et un début de fièvre annonciateurs de ce qui allait se révéler une angine carabinée. Le petit déjeuner eut du mal à passer, et ainsi de tous les repas qui suivirent... Inutile de nier que ma confiance en moi en prit un petit coup, à l'approche de la première épreuve. Néanmoins je n'avais pas fait ce chemin pour vivre les championnats depuis le lit d'une chambre d'hôtel, et c'est dans un état plutôt vague que je pris le chemin de la salle destinée à accueillir la compétition.
À 10h exactement le début de la première épreuve était donné, de même que lors du BIST 2011, au moyen d'un instrument traditionnel évoquant un tambour suspendu. Je partageais ma table avec Joshua Zucker, un joueur américain des plus agréables, et avais l'oeil sur Tiit Vunk et Rishi Puri, tous deux immédiatement à ma gauche.

Épreuve 1 : Classic Sudoku (30')
18 grilles pour ce sprint annoncé de 30 minutes. 14 grilles 9x9, 3 6x6 par amabilité et, pour le clin d'oeil, une 4x4... employant les chiffres de 0 à 3 et valant un point. Pas de mystère, un seul objectif : tout faire.
Je commençai par la 12e grille, valant 15 points, afin de situer le niveau de difficulté, et progressai vers les grilles les plus difficiles. Il apparût que certaines n'étaient déjà pas totalement évidentes, mais je terminai néanmoins cette série de 7 grilles sans souci majeur et enchaînai sur les plus faciles. Je terminai la série de 9x9 à l'exception de la grille à 12 points sur laquelle je ne voyais pas l'ouverture, poursuivis avec les 4 petites car la fin de l'épreuve approchait et retournai sur la 12... qui décidément ne me sourit pas puisque le gong résonna avant que j'en aie terminé avec elle. Bilan : 188 points sur 200 ; 224 pour Kota Morinishi qui démarrait en fanfare avec un bonus de 3 minutes.

Épreuve 2 : Common Variant Sudoku (88')
18 grilles également (le thème du tournoi était le chiffre 8) mais une durée presque triple pour cette première épreuve de variantes. Property, ISO, Ring, Nine Dragons, Interconnected Sudoku... Un grand méli-mélo de grilles particulièrement variées et pas toutes aussi communes que l'annonçait le nom de l'épreuve. La difficulté moyenne s'avéra suffisamment raisonnable pour qu'il fût envisageable de terminer l'épreuve dans les temps, mais il me manqua un chouïa de vitesse pour ce faire. Je rendis 17 grilles ; 3 à 4 minutes me manquèrent pour engranger les 45 points du Sudoku Fortress. Il s'avéra malheureusement que j'avais rendu deux grilles avec, respectivement, une case vide (Six Point Star Sudoku) et deux chiffres inversés (Ring Sudoku). Deux fois 10 points de retrait, pour un total de 535 sur 600 ; seul Tiit Vunk en finit dans les temps, mais sans bonus.

Épreuve 3 : Jigsaw Sudoku (15')
Il est presque de tradition qu'un championnat du monde de sudoku se doit de comporter au moins une épreuve controversée ; cette année, le rôle fut indéniablement tenu par la troisième épreuve, au concept intéressant mais à la réalisation plus discutable.
Le principe : une grille vierge accompagnée de trois enveloppes marquées chacune d'une lettre ; dans ces enveloppes, huit pièces de papier comportant un nombre plus ou moins élevé d'indices : minimal pour l'enveloppe A, intermédiaire pour la B et maximal pour la C. Charge au joueur de déterminer l'emplacement de ces pièces dans la grille afin de pouvoir résoudre celle-ci, sachant que le fait d'ouvrir l'une ou l'autre enveloppe conditionne la valeur de la grille : si seule l'enveloppe A a été utilisée, la grille vaut 100 points (+ points de bonus éventuels) ; si la B a été décachetée, sa valeur chute à 50 points et la compléter ne rapporte pas de points bonus ; enfin, si les indices de la C ont été employés, c'est d'un maximum de 20 points que l'on héritera.
Ce qui aurait pu s'avérer une épreuve plaisante se sera malheureusement révélé plus laborieux qu'agréable, le positionnement des pièces faisant manifestement davantage appel à un mélange d'intuition et de chance que de raisonnement logique ; c'est du moins ainsi que les joueurs ayant eu le bonheur d'en finir avec l'enveloppe A décriront leur prestation. Pour ce qui me concerne, après avoir gâché 5 minutes en pure perte, je me résolus à ouvrir l'enveloppe B et trouvai heureusement l'agencement adéquat rapidement, me permettant de sauver les meubles en assurant 50 points. Tiit Vunk, Jan Novotny et Zuzana Hromcová prirent sur cette épreuve une avance confortable sur la plupart des autres concurrent(e)s en engrangeant 148 points, là où nombreux parmi les favoris ne dépassèrent pas mon score.

 
 Dans le vif du sujet

Épreuve 4 : Classic Sudoku 2.0 (35')
Un repas arrosé au soda plus tard (nous apprîmes avec le temps à constituer des réserves d'eau, en profitant notamment de la politique de l'hôtel "une bouteille d'eau offerte par personne et par jour" ), reprise des hostilités sur le même modèle que le matin : classiques puis variantes.
Seconde et dernière épreuve "purement classique", celle-ci ne comportait que 8 grilles s'étageant entre 22 et 36 points ; l'on était donc en droit de s'attendre à de beaux morceaux, et de fait, les grilles s'avérèrent un bon cran au-dessus de ce que nous avait montré l'épreuve 1. Les classiques retorses n'étant pas mon point le plus faible, et malgré un état de santé n'allant pas en s'améliorant, je rendis donc l'épreuve avec près de 6 minutes de marge, m'assurant un score de 270 points sur 230 hors bonus (maximum 286 pour Jakub Ondroušek).
À ce point de la compétition, et bien que son départ tonitruant eût déjà mis Tiit Vunk sur orbite, les choses semblaient prendre pour moi un bon tournant.

Épreuve 5 : + – × ÷ (40')
J'abordai cette cinquième épreuve de façon passablement indécise. En effet, si la plupart des grilles semblaient devoir me convenir (Killer, Arrow, Star Product...), la dernière (et plus chère) promettait d'être en mesure d'opposer une forte résistance. Il s'agissait d'une variation sur le thème du Mathdoku, variante dont certains indices, chevauchant deux cases, correspondent au résultat de l'une des quatre opérations arithmétiques de base appliquée aux deux chiffres correspondants ; chaque opération devant être utilisée une fois et une seule par région contenant des indices (exemple). La particularité de la grille qui allait nous être proposée était que les indices ne correspondaient plus au résultat de l'opération, mais au chiffre des unités de ce résultat, d'où un nombre de possibilités considérablement accru. Après m'être débarrassé sans peine de 6 des 8 grilles de l'épreuve et disposant encore de plusieurs minutes, je commis alors l'erreur de m'attaquer à celle-ci au lieu d'assurer les 10 points du minuscule Outside Sum Sudoku 5x5. Et bien mal m'en prit puisque ni les 55 points du Mathdoku, ni les 10 points du Outside Sum, que j'attaquai en désespoir de cause à moins de trente secondes de la fin de l'épreuve, ne tombèrent dans mon escarcelle. 185 sur 250, contre 195 pour la plupart de mes adversaires directs, ceux-ci ayant visiblement fait preuve de plus de sagesse.

Épreuve 6 : Ball Sudoku (25')
Première épreuve par équipe, celle-ci était également la seule du tournoi dont la durée avait été lourdement mésestimée. 6 grilles classiques à résoudre et à relier entre elles à l'aide de 12 grilles 4x4 afin de former une pseudo-sphère : la chose aurait pu être intéressante, mais la difficulté des grilles classiques réduisit à néant les chances des équipes de profiter vraiment de ces 25 minutes. La Pologne, avec ses 480 points sur 750 (4 grilles résolues), fut la seule à sortir la tête de l'eau, aucune autre équipe n'en ayant résolu plus de deux. La France se contenta d'un bien modeste score de 120 points, avec une seule grille complétée. Avec l'épreuve 3, celle-ci restera à mes yeux comme à ceux de nombreux/ses autres participant(e)s la principale déception du tournoi.

Épreuve 7 : Match Sudoku (30')
Cette deuxième épreuve par équipe était construite sur un tout autre modèle : 8 grilles, de 8 types différents, nous attendaient ; chacune était insoluble telle quelle, et devait être appariée à l'une de ses sept congénères. Une fois les règles et indices de ces deux grilles associés, il devenait possible de les résoudre. Quatre paires à constituer donc, à partir des variantes suivantes : Diagonal, Killer, Odd Even, Anti-Knight, Consecutive, Inequality, Windoku et Little Killer.
Nous avions auparavant discuté de nos points forts/faibles respectifs afin de préparer dans une certaine mesure la répartition des grilles, pour le cas où nous parviendrions à les apparier rapidement. De plus, nous avions prévu de concentrer dès le départ nos efforts sur le Sudoku Odd Even, a priori celui permettant le plus d'éliminations. Pour l'anecdote, les grilles contenaient respectivement 7, 0, 0, 6, 0, 0, 6 et 0 chiffres donnés, ce qui encourageait de fait à déterminer les couples le plus tôt possible.
Nous nous mîmes donc d'emblée à travailler de concert à rejeter six variantes ne pouvant coller au Sudoku Odd Even. Très vite, il devint clair que celui-ci allait avec le Sudoku Inequality et je me collai à sa résolution pendant que le reste de l'équipe cherchait à apparier les six grilles restantes. L'une et l'autre tâches furent rapidement expédiées, et pendant que Sylvain s'occupait de son côté du couple Consecutive/Little Killer, j'aidai Frédérique à passer le point de blocage de la paire Killer/Anti-Knight avant de rejoindre Timothy, à la peine sur la redoutable Windoku/Diagonal que nous achevâmes à quatre.
Une rapide vérification de l'ensemble des grilles et nous rendions notre copie avec un peu plus d'une minute trente d'avance, assurant 30 points de bonus et nous offrant le luxe de finir cette épreuve en tête (seule la Chine en terminera également dans les temps, une minute après nous) : 830/800.

Épreuve 8 : Mah-jong Sudoku (30')
Crayons interdits pour cette dernière épreuve de la journée - et ultime épreuve par équipe -, qui promettait également d'être la plus originale. Une seule grille nous attendait, dépourvue de chiffres mais abondamment fournie en indices sous la forme de lignes de couleurs variées, correspondant à des combinaisons de Mah-jong. 81 pièces dudit jeu accompagnaient la grille et devaient permettre de la résoudre compte tenu des contraintes induites par les lignes précitées. Nous avions également préparé cette épreuve autant que faire se pût, et pensions l'aborder dans de bonnes conditions. Malheureusement, une combinaison de myopie et de précipitation nous conduisit à accumuler les bourdes, nous forçant à recommencer une première fois la grille de zéro puis à revenir plusieurs fois en arrière afin de corriger l'une ou l'autre erreur de placement. Nous rendîmes la grille porteuse de 50 pièces, écopant ainsi des 500 points correspondants, un bien maigre score par rapport à nos concurrents directs (Chine 1070, Japon 920...). Nous avions incontestablement les moyens de terminer cette épreuve dans les temps ; quelques regrets donc.

 Ne pas confondre vitesse et précipitation (à retenir)

À l'issue de cette 8e épreuve, c'en était fini des championnats pour ce premier jour. Malgré quelques couacs et un état de forme peu enthousiasmant je m'estimai satisfait de ma performance, pointant à la 2e place provisoire derrière Tiit Vunk et ayant déjà creusé l'écart de façon assez nette avec les joueurs/ses classé(e)s de 11 à 15. Trois épreuves individuelles nous attendaient encore le lendemain matin, suivies des phases finales l'après-midi. Pourtant la journée était encore loin d'être terminée pour moi, car ma soirée allait être occupée par la finale du Sudoku Grand Prix, qui me tenait particulièrement à coeur...

À suivre !

Nota : les images employées pour illustrer l'article ne m'appartiennent pas ; il va de soi que je les retirerai sur simple demande de leur auteur.

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